Extrait de courrier : "Adieu Villeneuve-lès-Maguelone, ces murs gris, ces grillages et ces barbelés"

  • Les amis et proches de Jean-Paul Degache
  • La vie en prison

Il y a quelques temps, nous vous avions proposé des extraits  d'un courrier écrit par Marc, une personne détenue à Villeneuve-lès-Maguelone ; aujourd'hui, en voici un second. Nous remercions à nouveau son auteur qui nous accorde le droit de le publier.

 

Lettre de Marc, écrite le 9 juin 2013, reçue par jean-Paul le 11 juin.

 

Mon très cher Jean-Paul,

 

En ce dimanche 09, jour de ta liberté, oh mon dieu !... que je suis super content pour toi !

 

J’ai passé ce dernier week-end avec toi, samedi, je n’ai pas vu la journée passer. Nous avons fait un bon casse-croûte. Il nous manquait un peu de vin mais on va attendre pour trinquer. Je pense que ta petite Gigi t’a préparé un bon petit dîner pour ce soir, avec un peu de vin… Comme tu as sûrement perdu l’habitude et que tu as perdu le palais, fais très attention au dosage. Je te fais confiance pour cela.

 

Ce dimanche, cela a été une journée un peu dure et pas comme d’habitude. Je suis rentré dans ta cellule avec un pincement au cœur : c’était la journée du déménagement. J’ai vu tes sacs bien remplis, les photos bien rangées. Tu es vraiment famille car tu les as enlevées au dernier moment.

 

À 13 h 30, quand j’ai pris mon chariot1 pour prendre tes affaires, je me suis dit « Mon petit Jean-Paul, tu vas partir dans un département voisin qui est l’Ardèche, ton pays que tu adores… » On a tout chargé, la grille verrouillée s’est ouverte avec l’aide du surveillant. On a pris l’ascenseur et te voilà vers la sortie. Je n’ai pu aller jusqu’au vestiaire. Je te l’avoue, j’ai eu une larme qui a coulé… Je me suis dit : « Je le reverrai un jour… »

 

J’espère que ta femme était à l’heure mais, pour cela, je lui fais confiance. Je me doute que c’était une grande joie pour vous. Vous vous êtes dit : « Adieu Villeneuve-lès-Maguelone, ces murs gris, ces grillages et ces barbelés. » J’espère que vous avez fait bonne route.

 

Tu as retrouvé de la verdure, ta maison. Comme tu me l’avais dit au retour de ta permission, rien n’a changé chez toi. Comme on en a parlé ce samedi, tu as une perle, je parle de ta femme. Elle a eu beaucoup de courage. Elle t’a soutenu avec une grande pugnacité : tous les mardis, un petit message sur la radio (RCF Maguelone-Hérault), dans l’émission Hors les murs2, un courrier toutes les semaines et sans oublier un parloir par semaine. Tu as été beaucoup soutenu par ta famille, tes amis et ton comité de soutien. C’est une preuve que tu es un garçon très attachant et surtout serviable. Je n’oublierai jamais les services que tu m’as rendus.

 

Je te l’ai dit de vive voix. J’ai eu trois AVC, tout mon côté gauche était paralysé. C’était en 2003. je suis resté six mois en soins intensifs. Quand j’en suis sorti, je ne pouvais pas écrire mon nom et j’avais perdu toute mon orthographe. Tu m’as beaucoup aidé et tous les week-ends, je te dérangeais. Tu m’as fait des cours. Tu as été un super professeur et cela je ne l’oublierai jamais : un grand merci à mon petit Jean-Paul !

 

Je vais m’arrêter là, en espérant que cette lettre vous trouvera en pleine forme. Surtout, donne-moi des nouvelles… ?

 

Profite de la vie. Tu le mérites tellement. Je t’embrasse très fort.

Marc

 

PS : Excuse-moi pour les fautes… C’est mon cœur qui a écrit… Tu as été le premier à me fêter mon anniversaire. Merci.

 

1Marc est auxiliaire d’étage, auxi d’étage comme on dit… et il s’occupe, entre autres tâches (ménage, nettoyages divers, distribution des repas…), des déménagements d’une cellule à l’autre, des changements de bâtiment et d’accompagner ceux qui sortent…

 

2Il s’agit de l’émission de radio hebdomadaire si précieuse pour le moral des détenus.

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