Virginie Despentes : Vernon Subutex 3

Vernon Subutex 3         par      Virginie Despentes

 Bernard Grasset (2017)  398 pages.

 

La troisième partie et la fin de l’histoire de Vernon Subutex était très attendue et Virginie Despentes n’a pas déçu en livrant un nouveau roman dense, incisif, proche de l’actualité et toujours très pertinent.

 

 

Les principaux protagonistes de l’histoire se sont regroupés autour de Vernon qui ne prend plus de drogue depuis des mois, a passé un an au camp, ce fameux camp et ses convergences dont on parle tout au long du livre, et a trouvé auprès de Mariana, sa petite amie, quelqu’un qui « le rassure davantage qu’elle ne l’étouffe. » Elle n’a pas trente ans : « Elle met dans le sexe et dans la danse ce qu’elle ne formule pas avec les mots. »

 

 

Vernon a changé : « Tout ce qui concerne sa vie d’avant s’est teinté d’étrangeté, fondu dans un chaos informe et lointain. » Il est perçu comme une sorte de shaman. Kiko veut faire de lui un prophète, un gourou mais cela ne lui plaît pas. Il veut poursuivre sa vie, tranquille. C’est l’occasion pour l’auteure d’affiner ses caractères, de compléter ce que nous savions sur ses personnages et de les faire évoluer.

 

 

Surtout, il y a Charles et cette fameuse somme de plus d’un million d’euros gagnée à la loterie nationale. Avant sa mort, il en a légué une partie à sa compagne, la Véro, une ancienne prof de français qui se réfugie dans l’alcool. Au passage, quelles bonnes vérités sur l’éducation et sur le droit au travail ! L’autre partie est pour Vernon et ses amis mais c’est le début des problèmes et d’une brouille dans le groupe.

 

 

La vision de Charles, à propos des humains se révèle assez réaliste : « des menteurs, des voleurs, des prétentieux et des rapaces. » Lorsqu’on parle des pays européens en grande difficulté comme la Grèce, Virginie Despentes est catégorique : « Les gens de pouvoir ne disent jamais la vérité parce que ça leur permet de prendre des décisions en douce. » Or, Vernon n’est pas comme ça : « Il ne se sent pas capable de mentir à tous ceux qui l’entourent. »

 

 

Peu à peu, les choses s’enveniment, les menaces se précisent. D’autres problèmes sont abordés comme le tourisme à Barcelone, les yachts de ceux qui ne paient pas d’impôts, les druides de toutes les religions, le racisme et l’argent.

 

Le souvenir d’Alex Bleach, le rocker mort d’overdose dans le tome 1, est bien présent avec ce Laurent Dopalet, producteur, qui veut  à tout prix se venger de ce que lui ont fait subir Céleste et Aïcha. La musique a toute sa place avec beaucoup de titres en anglais. L’attentat du Bataclan, Nuit debout, l’échec  de la gauche au pouvoir, les réfugiés, ces événements ou ces problèmes sont abordés au hasard d’une rencontre avec de nombreux personnages qui déboussolent un peu le lecteur.

 

 

L’auteure (photo ci-contre) n’oublie pas de défendre la cause des femmes et lance un terrible avertissement : « Combien de fois faudra-t-il répéter aux filles qu’elles n’ont pas à donner rendez-vous à des inconnus dans des lieux publics ? »

 

 

La violence est aussi bien présente et l’auteure ne s’en prive pas pour arriver au bout de son histoire : « Les grenades la kalach les balles. Ces objets qui ont été fabriqués. Qui n’ont pas été détournés de leur usage. Ils sont produits dans des usines pour ça. Tuer démembrer arracher brûler. Il n’y a pas d’accident. » L’absence de virgule dans l’énumération est bien volontaire pour nous pousser à la réflexion, aller au-delà de l’émotion, comme durant toute la lecture de ce Vernon Subutex 3.

Jean-Paul

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